mardi 16 mars 2010

Western Cape, Afrique du Sud, la grimpe au chaud en hivers

Septembre 2009, je grimpe le dos de l'éléphant à Bevella en compagnie de Cécile. Une cordée sud Africaine nous suit.
Ils me parlent de l'escalade dans leur pays. "On a plein de voies en terrain d'aventure, dont certaines de grande envergure... Oceans of fear environ 20 longueurs". Ah bon? Pour moi l'Afrique du sud se limitait à Rocklands en terme d'escalade.
"Tu travailles en Angola?" me dit-il,"c'est la porte à coté, la prochaine fois arrêtes toi à Cape town!"
Ce genre d'invitation, avec moi, ne tombe pas dans l'oreille d'un sourd!

Vendredi 19 fev 2010, je survole l'Afrique du Sud en direction du Cap. Atterrissage avec vue sur Table Mountain, le majestueux symbole des lieux. La première chose qui me surprend est la quantité de falaise abrupte qui entoure la ville.
Liezl m'accueille à l'aéroport et m'annonce le programme: "Frederick finit de bosser et ensuite on part ce week end à Cederberg un endroit magnifique."
J'ai googlé comme un malade à la recherche de tous les spots autour du Western Cape, et celui là m'a visiblement échappé! Vu la tonne de cailloux que j'ai vu depuis l'avion, je ne suis pas étonné.
Mes amis habitent Stellenbosh, à 30 min de Cape town, dans une résidence de type anglais où toutes les maisons se ressemblent.

Je retrouve Frederick qui m'annonce "Je t'ai trouvé un partenaire qui va t'amener grimper à Yellow Wood" Cette falaise là, aux allures d'Ordessa, ne m'avais par contre pas echappé. Un petit email dirigé et le tour fut joué... je suis très excité à l'idée de voir ce site, mais ce sera pour plus tard, pour l'heure c'est Cederberg.

Situé à 3h de route de Cape town (dont une sur piste), Cederberg représente une vaste chaine montagneuse au nord du Western Cape. Le Ceder est un arbre que l'on trouve dans le coin, et berg signifie montagne en Afrikans (et en d'autre langues aussi j'imagine comme l'Allemand). L'altitude des lieux ne doit pas dépasser 1500m. Il y a plusieurs falaises dans le coin, celle où nous allons est Wolfberg (la montagne des loups pour ceux qui ont suivi). L'endroit est désertique, seuls quelques fermiers y habitent. Ils sont donc propriétaires des lieux y compris les falaises. Il faut bien comprendre que comme dans beaucoup d'endroits du monde, l'escalade est tolérée, mais est sur la corde raide! Un seul faux pas et le site peut être interdit d'accès par le fermier. Il faut donc demander leur autorisation et acheter un permis!!! Eh oui ça marche comme ça! Le camping sauvage est interdit. Les fermiers disposent de camping confortables et pas chers. Il y a aussi une règlementation, genre parc national dont je n'ai pas spécialement compris les nuances, mais en faisant appel à un minimum de bon sens, il n'y a aucun problème.
Un autre point important... Au même titre que le renard Corse ou Montrebeyen, les animaux sauvages, si mignons qu'ils soient, n'ont pas à être nourris !!! Tout particulièrement le babouin. A bon entendeur...

Nous nous installons dans le bungalow que mes amis ont loué. Une organisation irréprochable de leur part!!! Assez de nourriture pour tenir un siège, des bières, du vin et du digestif local! Je suis accueilli comme un prince, et tout ça me fait prendre conscience que je me suis pointé la gueule enfarinée les mains dans les poches!!!

Lendemain matin 6h. Notre objectif s'appelle "Day of the Jackals", coté 19. Ah oui... les cotations sont différentes. Ici pas de lettres, de + ou de -, juste un chiffre. Comment faire plus simple? 19 correspond à peu près à 6a+.
L'itinéraire, a l'air assez évident mais sinueux. Contrairement aux topos de chez nous,les sud africains ne font pas de croquis. Il y a une photo de la face avec un tracé, et une description de la voie longueur par longueur. Bien parler anglais s'impose donc comme une évidence si vous voulez vous en sortir! A noter qu'il existe des topos entièrement en Afrikans!!! Alors là bon courage! Même les relais n'apparaissent pas sur le tracé. J'en fait part à Frédérick "C'est bien les croquis quand même... tu peux savoir où sont les pitons ou des trucs comme ça..." "Si on trouve au moins 1 piton dans la voie on aura de la chance" m'a-t il répondu. Ici il est interdit de poser des bolts (gougeons).

un 4+ qui réveille !!!

Il me propose de commencer, et de faire les 2 premières longueur en une. Le crux étant la deuxième longueur. Je m'équipe et constate : je possède un jeux complet de camalot, tous mes copains ont des camalots mais aujourd'hui on utilise le jeux de Fred! Et le nombre de ses camalots est exactement 0! Je sens que je vais un peu batailler au début!

La première longueur est coté 15 (soit 4+). Je n'ai pas souvenir de m'être mis autant à l'envers dans un 4+ de toute ma vie ! Prétextant avoir du tirage, je fais le relais comme indiqué sur le topo, soit avant la longueur dure. En gros je me dégonfle! Fred propose de continuer... je me dégonfle donc une deuxième fois. Il lutte copieusement pour passer le toit, et s'en voit pour le reste aussi. Une longueur grandiose. L'escalade est athlétique, et le rocher, ce grès ocre très dur, des plus agréable. Quand le rocher est noir, l'adhérence n'est pas bonne, il faut s'employer à verrouiller ses doigts dans les fissures ou à serrer des plats fuyants. Je finirai le reste de la voie en tête où reste un petit pas de bloc en 6a. Le dernier mur étant tout simplement hallucinant.
Nous redescendons à pieds par un petit canyon encaissé magnifique. Le reste de la descente est des plus pénible par 37°c en plein soleil.

L'après midi nous allons à une vasque appelée Maarat (prononcer Mor_rat en essayant de rendre ça le plus horrible possible pour que ça sonne bien Afrikans). L'eau est chaude (plus de 20°c) et on peut sauter depuis des blocs de 8 à 12m.

Le soir tradition sud africaine oblige, c'est barbecue. Plus bière, vin etc... L'alcool aidant (j'imagine), notre objectif du lendemain est "Alone in Space". Une ligne évidente de dièdre et de fissure. La voie est soutenue dans du 19/20 (6a+/6b) avec une longueur clef en 22 (~6b+/6c). Nous faisons l'approche à la fraiche et nous asseyons pour examiner la voie. Elle est en grande partie au soleil et j'ai le sentiment qu'elle le restera un moment. Cela n'inquiète pas Frederick, mais moi oui par contre. Des longueurs soutenues en plein cagnard ça relève de la torture.
Fred m'avoue qu'il grimpera à sa limite et que les cotations ici sont plutôt sévères (ok... je comprends mieux le coup du 4+). A bien y réfléchir je risque de bien être au taquet aussi.

Changement d'objectif! On fera "Old timer desease" 3 grandes longueurs en 19 et une en 21. Le topo donne 5 étoiles pour cette voie, décrite comme déversante sur bonne prise. Arrivé au pieds du mur je ne vois aucune ligne évidente. En lisant attentivement le topo, j'aperçois le cheminement astucieux, évitant des toits et gros surplombs. Du coup j'attaque la première longueur car elle m'inspire. Un mur raide avec de grosses écailles et prises solides (quoique j'ai pété la première) qui mène à un autre mur de gruyère, et traverse enfin à gauche pour rejoindre une vire.
L'escalade ressemble à Riglos, déversante sur grosses prises. Là où c'est dément, c'est que l'on trouve un endroit pour une bonne protection.

Fred me rejoint au relais, et s'élance dans la deuxième longueur. Il place une protection, et après quelques hésitations, traverse un ou deux mètres à droite et grimpe au plus évident. Deux secondes plus tard, il arrache une écaille et disparait une dizaine de mètres plus bas sous la vire. Je me fais violemment secouer au relais, mais plus de peur que de mal. Il remonte et me dit avec un flegme déconcertant "Ce coup ci, je crois que je vais aller tout droit!" Après un plomb comme ça, la sérénité n'est plus de mise! Je suis nerveux au relais et lui aussi. Il se remettra un autre petit vol d'ailleurs. Cette longueur est courte et explosive avec un pas de bloc un peu retord.Le soleil est sur nous, et il fait très chaud. J'enchaine la troisième longueur, très technique et originale, où le crux est un pas d'équilibre assez loin au dessus d'un alien foireux. Reste la dernière longueur, la plus dure, qui en fait ne sera qu'une formalité. Un rappel pour descendre... mais il faut aller le chercher, sans les chaussures c'est bien pénible... la descente sera pire que celle de la veille, je suis totalement déshydraté!

Cette voie originale et physique restera mon meilleur souvenir d'escalade en Afrique du sud. Car malheureusement pour moi, le temps ne sera pas très stable les jours qui suivront. Donc visite du Cap etc... Un en droit merveilleux.
Et donc pas de Yellow Wood. J'aurais cependant l'opportunité de grimper sur une falaise (équipée) de granite, dont j'ai oublié le nom, ainsi qu'à Table Mountain en compagnie de Farrel. Table Mountain propose aussi un terrain de jeu extrêmement varié avec une vue sur l'océan somptueuse. L'escalade est là aussi un des joyaux d'Afrique du Sud.

Farrell en route pour Table mountain

Mon voyage fut de trop courte durée. J'ai été émerveillé par l'Afrique du Sud, par ses paysages, ses gens, son histoire aussi (pas franchement glorieuse)... L'accueil que j'ai reçu est tout simplement exceptionnel, je ne remercierai jamais assez mes amis pour cela!
J'ai donc gouté un peu à tout, sans vraiment y mordre pleinement dedans, de plus de par mes nombreuses discutions avec Fred je n'ai vu qu'un petit échantillon...
Je vais donc y retourner, c'est très clair dans mon esprit! Fred me disait "Nous avons été colonisé par les mauvais pays... vous les Français devriez venir et reprendre le contrôle et les choses en main!" C'est bien sur ironique, et vu le bordel qu'on a mis partout en Afrique je ne sais pas si c'est une si bonne idée que ça, en tout cas l'invitation est lancée, et on sera toujours les bien venus là bas. Avis aux amateurs...

Quelque petites infos pratiques:
Le vol pour l'Afrique du Sud est ce qui plombe le budget. Il faut prendre un vol pour Johannesburg, puis un vol régional pour le Cap. Possibilité d'un vol direct depuis Londres. En cherchant bien à l'avance on doit pouvoir trouver un vol AR pour 700 euros.
La monnaie locale est le Rand. Le change est 11 Rands pour 1 Euros. La vie est 30 à 40% moins chère qu'en France.
L'Afrique du Sud connait un taux de criminalité nettement supérieur à ce que l'on connait chez nous. Il ne fait pas bon trainer tard la nuit, surtout dans la région de Johannesburg.

Niveau escalade il faut du matos pour grimper en style traditionnel. Un gros jeu de friend. Le rocher est principalement du grès. Quelques zones de granite et une de calcaire. Il existe des spots de falaise, et bien sûr la Mecque du bloc à Rocklands.

Petit lexique pour mes amis en froid avec la langue de Shakespeare (et ils sont nombreux):
Assurer -> to belay
Un relais -> belay stance
vaché -> off belay ou safe
une vire -> ledge
fissure -> crack
écaille -> flake
2 bières s'il vous plait -> 2 beers please
vous êtes très élégante mademoiselle -> I want to fuck you like an animal

5 commentaires:

xavier a dit…

mon putaine de briquet/my fucking later

Lolo a dit…

my fucking lighter... mais bel effort quand meme ;-)

Bea a dit…

Bonjour! En cherchant des infos d'escalade à Cape Town je suis tombée sur ton blog. J'ai vu que à l'époque tu travaillez en Angola....je ne sais pas si c'est toujours le cas, nous on est à Luanda depuis un an.

Pourrais-tu nous "guider" un peu pour une aventure escalade en afrique du sud? (contacts, adresses...)

Merci!!!
Beatriz

Lolo a dit…

Salut Bea,

je viens de voir ton message à l'instant. Je travaille toujours en Angola en effet. Je suis en ce moment même au Cap. On grimpe un peut partout autour. Contacte moi si tu veux des infos ou éventuellement nous rejoindre.

Anonyme a dit…

Bien le bonjour,

Je vais travailler à Luanda à partir de septembre et j'aimerai savoir quelles sont les possibilités pour grimper en Angola (site internet des sites de grimpe ?). D'avance merci pour tes infos...
grandnoir@yemsi.com
ToF